Quatre guetteurs dans le vent

Les filles, vous les préférez comment ? Avez-vous rencontré Patrick Bruel ? Etes-vous des sex-symbols ? Hey ! Attendez une minute. Vous pensez vraiment que les Pow Wow raffolent ce genre d'interview ? Tiens, si on parlait vraiment musique pour une fois ? Si Ahmed, Alain, Pascal et Bertrand nous présentaient eux-mêmes leur nouvel album ? A capella ? Super, non ?

C'est Pascal qui est arrive le premier. On s'est installe au bar de l'hôtel California et on a commence à bavarder tranquillement, en attendant les autres. Sous son allure rock, un étonnement juvénile : Pascal vient d'apprendre que " Regagner les plaines ", plus d'un an après sa sortie, est remonte à la dixième place du Top Album. " Incroyable! " dit-il. C'est le mot. Le succès phénoménal de Pow Wow en a déconcerté plus d'un : un million deux cent mille albums, double disque de platine, sans compter les Victoires de la Musique, etc. Du jamais vu ! Un groupe (uniquement) vocal qui se taille la part du lion dans un univers impitoyablement dominé par les synthés techno, c'était quasiment inimaginable pour ces quatre musiciens venus d'horizons beaucoup plus rock, Alligators en tête.

Depuis un an, les Pow Wow sont sur tous les fronts. Concerts, promo, séances photos. Ils ont néanmoins trouve le temps d'enregistrer un second album, " Comme un guetteur ", plus épatant encore que le premier, et dont ils ont toutes les raisons d'être " contents ". " L'état d'esprit, pour cet album comme pour le premier, c'était de se dire "peu importe si ça marche ou pas, il faut qu'on en soit fier, qu'on puisse le faire écouter à nos enfants et à nos petits-enfants. " Voila: Ahmed, Bertrand puis Alain sont venus nous rejoindre autour de la table, le magnéto est branché et tourne.

- Vous n'aviez pas le trac en commençant ce disque ?

Bertrand : On a commencé à l'écrire à un moment où l'on n'avait pas vendu autant de disques. Il y avait eu le succès du " Chat ". " Le Lion " s'annonçait bien mais on… Donc, nous étions dans le même état d'esprit. On a donc procédé de la même façon que pour le premier. On est parti dix jours dans une petite ferme en France, avec un petit magnétophone comme le tien et une guitare, c'est tout. On se baladait, on allait aux champignons et on composait au coin du feu. Un peu plus tard, on a terminé les arrangements à Cannes, sur les hauteurs…

- Pas de " pression du succès " donc ?

Bertrand : Non… On se savait attendus au tournant. Mais cela ne nous a pas du tout influencé. On a voulu rester spontanés, instinctifs, se faire plaisir…et surtout éviter d'essayer d'analyser ce qui avait marché. On a enregistré exactement dans les mêmes conditions, avec les mêmes personnes.

Pascal : On travaille toujours dans l'urgence. Jusqu'à présent, on s'en est bien sortis.

- Vous avez bien dû vous demander pourquoi ça marchait autant, non ?

Pascal : je crois qu'on est arrivés au bon moment. Un moment où il y avait plein de techno, et soudain, il y a quatre mecs qui chantent en français une chanson a capella. Finalement, les choses s'équilibrent…

Bertrand : C'est hallucinant… un disque a capella !

Ahmed : C'est drôle parce que souvent les journalistes mettent ça complètement de côté. La musique a capella, jusqu'ici, ne touchait pas plus de dix mille personnes en France.

Pascal : Le plus fou, c'est que quand tu es môme, tu rêves d'avoir un jour un disque d'or. Et là, à partir du moment où on a eu notre disque d'or, ça été vraiment très vite : disque de platine, double platine.

Ahmed : Alors que mathématiquement, on est un groupe qui ne pend pas (rires).

- La célébrité, ça ne vous a pas fait enfler la tête ?

Ahmed : On peut pas avoir la tête aussi grosse que le succès qu'on a…

Pascal : Non, ça ne risque pas de nous arriver. Parce qu'on sait tous ce que c'est de faire la manche avec une guitare… Pas de problème.

- On a l'impression que " Comme un guetteur " est encore plus proche de vos racines musicales…

Alain : On ne peut pas nier nos racines. Si elles transparaissent dans un travail qui, pour nous, est assez élaboré et assez moderne, alors c'est génial. A mon avis, c'est une des clés pour durer. Je ne pensais pas qu'on sentirait ça tout de suite…

- Vous avez introduit un piano sur la chanson " Comme un guetteur " ?

Bertrand : C'est un titre qu'on chante depuis longtemps sur scène. Jusqu'ici on faisait une version plus " Doo Wap ". Par rapport au texte, qui se passe à l'aube du 31 décembre de l'année 1999, on avait envie d'une ambiance plus évaporée, plus légère. On a également mis une guitare sur " Le poisson dans la vitrine "…

- Vous n'envisagez pas de devenir un groupe comme les autres ?

Bertrand : Il est possible que, sur scène, on fasse un morceau à quatre guitares. Mais une formation rock classique, je ne crois pas…

Ahmed : Vaut mieux faire ça avec un grand orchestre… ou un quatuor à cordes.

- Après " Le chat " et " Le lion " vous persistez et signez dans le registre animalier avec " Le poisson dans la vitrine "...

Alain : C'est une petite mélodie bossa qui existait depuis longtemps. Le texte, écrit en Normandie, est inspiré par une petite boutique de souvenirs au bord de la plage. C'est une histoire d'amour...

- Des titres comme " Money " et " Chain gang " ?

Ahmed : " Chain gang " c'est une reprise de Sam Cooke.

Bertrand : Il y a des percussions qui rappellent les chaînes des forçats. On est assez contents d'avoir fait cette version. Et " Money ", c'est une compo. Un morceau qu'on a pensé " scène ".

Alain : " Money " est sortie carrément en répétition. On était en train de faire le bœuf, il y a eu un riff, et on mis les voix dessus très vite.

Bertrand : C'est la chanson la plus rock de l'album. L'histoire de quelqu'un qui est caissier dans sa petite banque et qui se prend à rêver de participer à un hold-up. Sans qu'on sache vraiment si c'est un rêve ou la réalité. C'est simplement une chanson sur la frustration, sur l'argent et le pouvoir que ça amène. Mais sans prétention...

- Sam Cooke, le Rythm'n'blues, ce sont vos racines communes ?

Alain : C'est un des trucs qui nous réunit, oui...Comme les Beatles ou les Stones.

Ahmed : Tous les chanteurs noirs américains sortent des écoles de gospel, donc du chant a capella.

- Il y a d'autres reprises sur l'album ?

Pow Wow (en chœur) : " I wanna Be Like You " !

Bertrand : C'est la chanson du Roi des singes dans le " Livre de la Jungle ". Une des premières qu'on ait voulu chanter mais, à l'époque, on s'est dégonflés. Pour l'album, on l'a montée très vite, trois ou quatre heures. C'est un morceau qu'on prend beaucoup de plaisir à faire, qui est assez drôle. Il y a plein de chef-d'œuvres comme ça dans Walt Disney. Autre reprise, " Earth Angel ", un slow doo-wap. Je ne sais pas de qui...

Alain : ... Les Penguins.

Pascal : Encore un animal. On s'refait pas.

Ahmed : Et puis, " Jamaica Farewell ", un standard.

Alain : Encore une qu'on faisait un concert et qu'on n'avait pas eu l'occasion de poser sur disque. C'est un titre où chacun de nous a son petit couplet à chanter.

- Faire découvrir ces " classiques " aux teenagers, ça vous intéresse ?

Alain : Ce n'est pas une vocation mais on a découvert qu'on amenait ça aussi, et on en est très contents. Cet espèce de ont entre les générations. C'est vachement bien.

- Vous sentez-vous plus à l'aise quand vous chantez en anglais ?

Alain : Ça dépend des chansons. Parfois le français ne colle pas avec l'esprit. Comme " Dream "... Sur ce titre, on fait quelques essais en français, mais ça prenait tout de suite une tournure guimauve. L'esprit de " Dream ", c'était les Beach Boys, les Mamas & Papas...

- " Sampan " est assez surprenant...

Bertrand : Tant mieux ! (rires) C'est un mariage qu'on aime bien entre une mélodie très extrême-orient et un refrain classique, plus Vivaldi (il chante).

- " Le Roi des escrocs " ?

Bertrand : C'est un clin d'œil. Une chanson sur quelqu'un qui prend la vie du bon côté. Tout le monde est tellement stressé-flippé-inquiet-angoissé-anxieux avec tout ce qu'on nous balance. Merde, on n'est pas les plus malheureux du monde, même si, en France, il y a des trucs durs.

- " Mama " ?

Bertrand : Même chose que pour " Money ". On est parti d'un mot qui sonnait bien (il chante)... et puis on a bâti l'histoire sur cet exilé qui fait une chanson pour sa mère. C'est un titre basé sur l'impression de se sentir étranger quelque part.

- " Jesus " ?

Bertrand : C'est pas une nouveauté non plus. On a trouvé amusant de coller deux univers d'origine religieuse, l'influence gospel et le chant grégorien. Là encore, ça fait un pont entre deux cultures.

- " Le Bois mort " ?

Alain : C'est une de nos dernières chansons. Il y a, quelque part, une référence aux forêts qui disparaissent. C'est parti d'un riff gospel...

Bertrand : C'est " grunge baroque ". (rires)

- Le prochain album, vous serez tellement riches que vous irez l'écrire à Miami autour d'une piscine ?

Alain : (sourire) Comme ça, tu viendras nous voir là-bas.

Ahmed : Non, la seule chose qui changera, c'est qu'on l'enregistrera peut-être pas en France. Pour être vraiment tranquilles. Mais toujours avec la même équipe...

Alain Gouvrion
Salut !
date inconnue



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